Je vis en atypie

Je vis en Atypie (c’est un chouette endroit, je crois)

Alors peut-être que je devrais commencer par dire pourquoi j’écris ou pourquoi j’ai choisi ce titre, ou pourquoi je suis là ce midi devant mon écran, ou plutôt devant mon clavier car c’est bien mon clavier que je regarde et pas mon écran d’ailleurs. Mais non, je n’ai pas envie de dire pourquoi. J’ai plutôt envie de dire comment et ce dont j’ai envie. Aujourd’hui. Parce que demain, je n’aurais certainement pas les mêmes envies. Et c’est ça quelquefois le plus terrible en Atypie. C’est que tout s’enchaine, s’emmêle, va vite et une envie chasse une autre et un apprentissage chasse un autre et une curiosité chasse une bonne idée ou encore et encore. Et devoir faire ce putain de tri tout le temps dans sa tête, c’est tellement pénible parfois. 

Et encore, apparemment, je m’en sors pas trop mal. En Atypie. 

Depuis quelques semaines, j’ai rejoint un groupe Facebook sur les HPI HPE et autres joyeusetés réjouissantes. Non pas pour participer (manquerait plus qu’ça!) mais pour observer la faune locale et avec l’espoir (car il s’agit de ça n’est-ce-pas?), de m’y retrouver. De m’y délasser. De m’y complaire. Ou complaindre. Oui je fais des fautes et c’est fait exprès. C’est très beau d’inventer des mots. Alors j’ai suivi. J’ai lu. J’ai réagis. J’ai pensé. Mais clairement, boudille! Même sur un groupe où on espère trouver trouver de l’entraide, des réponses ou (au minima!) des interrogations pertinentes, c’est le désespoir de ce 3ème millénaire enfanté au Xanax que l’on retrouve. Plaintes, critiques, moi je, reproches, réponses bâclées, centrées sur le nombril de celle/celui qui répond. Toujours à côté quand même, on est en Atypie facebookienne. 

Petite, je ne me disais pas que c’était ça que je ressentais. Ce décalage profond, cet ennui et cette peur mêlée des autres. Du groupe surtout. En vieillissant, c’est davantage encore qu’un décalage. C’est un fossé irrépressible que je n’ai plus l’espoir, non même le désir de franchir. C’est conscient aujourd’hui. Je ne veux pas être au pays de la Norme. Non, non et non. Foutez moi la paix. Ignorez-moi. Et je vais tenter de vous ignorer. (Si je ne vous vois pas, on ne me voit pas?). Oui, d’accord, c’est pas ça la vie. La vie c’est des rencontres, des autres, des relations construites, des soirées avec des gens. Je ne me souviens pas de la dernière vraie fois où j’ai kiffé – réellement – vivre du côté de la Norme. Est-ce qu’une fois, je n’ai pas fait semblant? Est-ce qu’une seule fois je n’ai pas imaginé ressemblé à la Norme? Et, md (⬅︎ c’est pour Mon Dieu), que c’est difficile de vivre en Atypie dans le monde que la société de la Norme construit aujourd’hui. 

Je me lancerais en politique tellement j’en peux plus. Ah tiens… Je viens d’avoir une pensée que j’ai censurée moi-même. 

Voici, c’est ça la Norme focaldienne. Se censurer soi-même car l’on souhaite entrer dans le groupe des gens normaux. Je peux tenter tout ce que je veux, me convaincre de pouvoir mettre toute mon énergie à y paraitre, y paitre, y repaitre, mon esprit n’y rentre pas. Il s’en amuse, s’en désole, s’en réjouit, s’en fout, y renonce, ironise, élargit la pensée, dit des gros mots encore et encore et encore. (dans cette chambre noire). Et c’est là souvent que tout part dans tous les sens car à tenter, je m’aigris. Quand dans ma tête, ça part dans tous les sens, je veux dire que ça surchauffe. J’ai de l’énergie mentale à revendre. Plein d’idées, plein d’envies, plein de façons de canaliser et je voudrais pouvoir faire tout ça en même temps. Quand une idée arrive, toujours au milieu de 400 autres, et qu’elle est plus claire, (car il ne faudrait pas avoir à faire d’effort pour clarifier les autres), je la sélectionne. J’en fais le tour et la plupart du temps je l’abandonne car en faisant le tour, j’ai déjà : 

– soit, fait et refait l’histoire. Avec tous les tenants et les aboutissants. Tous les avantages et les inconvénients. Toutes les qualités et les défauts. J’ai fait Walt Disney, ses créateurs, les actionnaires, les banquiers et les petites mains. 

– soit, après y avoir pensé 2 minutes, elle m’ennuie déjà l’Idée. Car, bien souvent, elle ne peut être menée à bien qu’avec des gens. Et des gens, je ne peux pas travailler ou construire, ou faire avec. C’est trop difficile pour moi. Ça m’ennuie et me fait peur à la fois. 

Est-ce que les gens me font peur? Oui! Terriblement. Les gens dans la norme et les gens en Atypie aussi. Les groupes me terrifient. La foule me demande une concentration proche d’une épreuve de philosophie Licence 3. Pour ne pas dégoupiller et rejoindre Atypie immédiatement. Évidemment, il existe de bonnes et puissantes raisons à cela. Je les connais et je « travaille dessus ». Mais c’est ancré. Ces neuroatypies amène ce décalage. Et elles amènent également d’autres troubles qui facilitent les harcèlements, les mises à l’écart, le rejet, la cour de récréation est tellement une jungle. Les adultes semblent l’oublier. Et cette « maturité » accompagné d’une maladresse relationnelle épatante. C’est un mélange (dys)gracieux. Un mélange intense. Ah oui, pouif pouif puoif, que d’énergie pour mettre à jour son personnage. Et quel personnage. Que l’on est. Lorsqu’on se laisse aller à être soi. Totalement soi. Qu’on dit ce qui est là. Qu’on ressent le moment. Qu’on est pleinement là comme je suis là en mettant ces mots sur mon écran. Que je laisse ma pensée s’étirer comme elle s’étire. Juste à suivre une voie, choisie parmi d’autres parce que ça semble s’éclairer. Des mots qui viennent et qui se suivent. Des syllabes qui s’accrochent les unes aux autres. Et des idées qui ne s’alignent pas mais se superposent. D’autres qui reviennent mais je ne note pas car ce serait trop long. (Si un psy me lit, qu’il me fasse un bilan).

Et les gens m’ennuient. Sauf en séance. (Je suis thérapeute au fait). Enfin, pas toutes, certaines séances. C’est risqué é (je souligne en appuyant le é) d’écrire ça sur un blog du site où je présente ma façon de travailler. J’aime bien. Clairement. La plupart des gens qui viennent me voir sont vrais. Et vulnérables dans leur Vérité. Quand on part à la recherche de leur Sensibilité. Mais c’est juste impossible d’être cette Vérité à l’extérieur de l’espace de la thérapie. Se faire dévorer par la Norme? Non merci, très peu. 

Et en dehors, les gens m’ennuient. Très peu suscitent un intérêt vrai. J’ai l’impression -fausse- de ne pas… Je bloque, là. Rien ne s’éclaire. C’est l’ombre qui arrive. Est-ce Mon Ombre? Une ombre jungienne, profonde, sensible et sensitive? Certainement. Je ne sais pas comment être au monde dans une relation dans mon perso. Comment coïncider une relation autre, de nature humaine en Atypie? Ah, je mens. Avec une ou deux personnes autres que Chéri et Chérie, ça passe encore bien. Mais elle(s) est/sont en Atypie et s’y trouve(nt) bien. Je crois.

Revenons à Vérité. Authenticité. Honnêteté. Respect. Que de belles valeurs. Et bien sûr la toute première de toute en Atypie. Justice!

Youhouhou. Désuètes ces valeurs dans la société 3.0, à la poubelle les valeurs. D’un autre monde, d’un autre temps. Ça, ça fait mal. tous les jours. Pas une journée où, malgré moi, ou exprès? je ne les observe pas bafouées ces valeurs. Bafouées par la Norme. Bafouées par l’ogre capitaliste. Patriarco-financier. Tout part en sucette light.